samedi 2 octobre 2010

Interview de Vincent Templement


Bonjour,

la semaine dernière, Spirale était projeté en compétition au Festival Tours Métrages, se déroulant, vous l'aurez compris, dans la ville de Tours, au riche patrimoine architectural. Il s'agissait de la 5e édition de cette manifestation mais aussi probablement de la dernière.




En effet, comme me l'a expliqué l'organisateur François Leognany, ce genre de festivals, animés par des bénévoles rappelons-le, exige un énorme investissement physique et moral qui est difficile à concilier avec une vie professionnelle parallèle : trouver les salles de projection, communiquer sur l'événement, faire des demande de subventions, regarder les films reçus (plus de 600, cette année), contacter des personnalités pour le jury etc... Espérons,malgré tout, que d'autres passionnés reprendrons le flambeau, dans le futur.

Le jury était composé, entre autres, du réalisateur Nicolas Bary, dont je vous invite à visionner le sympathique et ambitieux Les enfants de Timpelbach mais aussi l'impressionnant court métrage Judas, la talentueuse comédienne et chanteuse Diane Dassigny que l'on a pu voir dans les efficaces courts métrages Organik de David Morley et Les petits sablés de Chloé Micout et le dynamique comédien et cascadeur Alban Lenoir, vu dans la série Hero Corp et Taken... N'oublions pas le passionné Xavier Desnos, animateur d'une émission de radio locale, l'autre monde, qui m'a d'ailleurs gentiment interrogé.


La compétition des courts métrages fantastiques était variée et de qualité avec notamment la bête de festivals Toute ma vie de Pierre Ferrière et le rigolo Les incroyables aventures de Fusion Man co-réalisé par Xavier Gens.




Nous avons pu aussi découvrir un court assez hypnotique : Next floor du canadien Denis Vileneuve. D'une richesse graphique assez rare dans le court (le réalisateur a déjà une belle carrière à son actif et a d'ailleurs déjà effectué son passage au long), Next floor va jusqu'au bout de sa logique burlesque et se permet un très pertinent commentaire sur la société de consommation, de manière détournée et magistrale, le tout sans aucun dialogue. Une vraie claque. Le court repartira avec un prix du public amplement mérité.


Deux autres réalisateurs en compétition s'était déplacés : Vincent Templement qui nous offrait un très rigolo Cabine of the dead et Marc-Henri Boulier qui venait défendre son imparable Tous les hommes s'appellent Robert. Ces deux très bons courts, percutants, ont logiquement été primés. Cabine of the dead a reçu le prix Orange et Tous les hommes s'appellent Robert, le prix de la cinémathèque de Tours ainsi que le prix du Jury.


Et ça tombe bien puisque Vincent et Marc-Henri m'ont tous deux accordé une interview.

Voici la première partie en compagnie de Vincent.



Peux-tu te présenter ?



Bonjour, je m'appelle Vincent Templement, 27 ans, originaire de la région Nord (Lille) et j'habite maintenant sur Paris. Depuis tout petit je suis passionné de cinéma et plus particulièrement de films d'horreur. Après un bac STI électronique et deux années à la fac, j'ai commencé à travailler sur des courts métrages comme assistant réalisateur.


En 2006, et grâce à une convention de stage, j'ai pu commencer à travailler sur une série pour TF1. Depuis je travaille comme assistant réalisateur sur longs métrages, téléfilms, séries télé et courts métrages. En 2009, Cabine of the dead est mon premier essai à la réalisation.






D'où t'es venue l'idée de Cabine of the dead ?



J'ai toujours été fan des films d'horreur et plus particulièrement des films de zombies. Je voulais donc pour un premier film, faire quelque chose qui pourrait m'amuser.



Ensuite, j'ai cherché la possibilité de faire un film à moindre coût, et le huit clos est vite arrivé.

Pour le choix du décor, la cabine, j'ai cherché l'endroit le plus absurde où on peut être coincé, à la vue des assaillants qui veulent vous tuer.




Tu es assistant réalisateur de formation? Est-ce que cela a été un plus pour la préparation de ce film ? Et au niveau de l'écriture ?



En tant qu'assistant réalisateur de métier, je m'occupe de tout ce qui est organisation et logistique d'un tournage. C'était donc évident que j'allais m'en mêler sur mon propre film.

Pour l'écriture, le problème est venu dès le début, je me fixais des barrières, en imaginant le temps de tournage trop long, ou le coût trop important des scènes que je mettais sur papier.

La première version du scénario a donc été vite rejeté par Rémi (mon producteur) qui m'a demandé de tout réécrire en me lâchant, sans contraintes, et après on verra ce qui est faisable ou non.



Pour la préparation, évidemment, je voulais être présent pour tout, les repérages, jeter un oeil sur le plan de travail, ... Ce qu'au final tous réalisateurs devraient faire.




Pourquoi avoir choisi d'inscrire le film dans un registre horreur / comique ?



Pour deux raisons, la première c'est que j'aime beaucoup ce mélange de genre. Sans aller dans le burlesque, les dialogues comiques et décalés dans une scène d'horreur limite gore, est ce que je préfère.



Et deuxièmement, pour mon premier film, et voulant faire de l'horreur, j'avais peur de ne pas réussir un film sérieux. Le gros risque pour un film d'horreur écrit au 1er degré est que s'il est raté, les gens trouvent ça drôle. Alors que faire de la comédie avec l'horreur, on cherche à faire rire. Et en réalisation, c'est beaucoup plus simple de faire rire, que de faire peur, surtout avec peu de moyens.



Comment s'est passé la préparation (repérage, répétition...) ?



Tout est allé très vite. J'ai commencé à écrire le scénario en janvier 2009. En même temps, nous cherchions le décor principal de la cabine, et je commençais déjà à choisir mes comédiens.

J'ai fini d'écrire en mi-février, et là j'ai pu me concentrer sur les répétitions avec mes comédiens choisis.












Après évidemment, il y a eu tout le travail du découpage technique pour définir les plans que j'allais mettre dans le film pour raconter mon histoire, chose qui n'était pas évidente autour d'une cabine téléphonique. Je travaillais aussi avec mes maquilleurs FX, en faisant des tests de look de zombies, avec la costumière, des réunions avec mon chef opérateur pour définir le style du film...



Tout ça jusqu'au début Avril, où nous avons tourné.




Y avait-il un story board ?


Non pas de storyboard. J'avoue que je n'en suis pas très fan. Quand on est en préparation, je fais le découpage technique, qui me donne une idée des plans à faire, mais une fois sur le décor, je peux changer en fonction de beaucoup de choses, du lieux où on tourne, des propositions de jeu du comédien...



Avoir un storyboard c'est s'enfermer dans ce qu'on a préparé. J'ai déjà travaillé comme assistant sur des projets où le réalisateur avait son storyboard, et à chaque changement de plans, il le brandissait en disant simplement "Bon, le prochain plan c'est ça !".




Je préfère me poser sur le décor, faire une mise en place de la séquence, voir mon comédien évoluer à l'intérieur, et me rendre compte des plans à faire après.


Mais bon, chacun sa méthode de travail bien sûr.





Tu as produit le court toi même ?


Oui le film est une auto-production. Mais nous avons été trois à le produire. La personne qui a vraiment géré la production est Rémi, qui a budgété le film, qui a fait les devis, et négocié avec les loueurs.



L'idée était de faire le film rapidement, et non pas d'attendre au moins un an pour avoir des financements, en sachant très bien que se faire produire un film de genre, de zombies, et une comédie, n'est pas chose facile en France.



Combien le film a coûté ?



Nous nous étions fixé un budget de 4500 euros, que nous avons tenu pour faire le tournage et la post-production. C'est un film qui aurait dû coûter beaucoup plus cher, mais nous avons eu beaucoup d'aides et il faut avouer que les films de zombies attirent pas mal les techniciens.



Comment as-tu trouvé ton casting ?



Tous les comédiens qu'on voit dans le film sont tous des amis ou connaissances. Au bout de quelques années de tournages comme assistant, j'ai rencontré beaucoup de comédiens, et j'ai donc choisi des gens avec qui j'avais déjà travaillé. Même les zombies sont des amis, et certains sont même de ma famille.





Comment s'est déroulé le tournage, à la fois d'un point de vue technique et artistique ?


On a eu un soucis de caméra une journée avant le tournage, et heureusement on a pu se retourner sur un autre loueur.



Mais le tournage en lui même s'est vraiment bien déroulé. Tout le monde a pu faire son travail le mieux possible et l'ambiance sur le plateau suivait le bon déroulement de chaque journée.

Côté artistique, j'avais vraiment tout ce que je voulais, et de voir les comédiens dans la lumière et le décor, on se rend compte à ce moment là que le film va exister et c'est très plaisant.




Qui a travaillé sur les maquillages spéciaux ?


Mary et Morgan de Kameleon Studios. Deux amis qui ont un atelier de maquillage fx sur Paris. Je les connaissais avant de commencer le projet Cabine of the dead et nous voulions travailler ensemble depuis un moment.


Nous avons vraiment collaboré ensemble, puisqu'au moment où j'écrivais le film, j'allais les voir pour savoir ce qui était faisable ou pas, selon le coût.



La musique est très particulière : qui en sont les compositeurs et quelles étaient vos envies ?



Les compositeurs sont Genaro et Fabrizio, du groupe italien électro Herr Styler. C'est grâce à notre monteur que nous les avons rencontré avant le tournage.



J'ai rencontré Genaro (Fabrizio travaillant depuis l'Italie), et nous avons été d'accord tout de suite sur le style de musique à mettre sur les images du film. L'idée était d'utiliser des sons qui ont été créé avant 1980, pour garder l'esprit des films d'horreur des années 70, avec le synthé, dans le style des films de John Carpenter.




Sur quoi travailles-tu en ce moment ?



Je suis au début de l'écriture de mon prochain projet, qui sera un court métrage beaucoup plus ambitieux, qui pourrait amener à un long métrage.

Je ne vais pas trop dévoiler, mais il s'agit d'un film d'anticipation / horreur. Plus de comédie pour le moment.


Vas-tu continuer de travailler dans le "genre" ? Si oui, pourquoi ?



Pour le prochain projet donc, je continue à travailler dans le genre horreur. Mon but est de m'exercer dans tous les domaines. Après avoir fait de la comédie/horreur, je veux essayer cette fois-ci de faire un film "sérieux" d'horreur.



Mais pour la suite, s'il y en a une, j'ai des projets de comédie pure, de science fiction, d'animation... Mais ne vendons pas la peau de l'ours.




Que penses-tu de la situation du court métrage actuellement (technique, moyen de diffusion etc...) ?


Le court métrage est essentiel à la culture et au cinéma. Je pense que ça évolue un peu, qu'on donne un peu plus d'importance à ce format. Et la preuve en est que beaucoup de techniciens professionnels qui travaillent sur des très gros longs métrages internationaux font eux aussi des courts métrages.

En terme de diffusion, beaucoup de choses sont faites, les chaînes commencent à développer des émissions de courts métrages, il y a un nombre incroyable de festivals partout dans le monde qui diffusent les courts métrages de tous les styles.



Le soucis concernant les courts métrages est plus particulier quand on parle de film de "genre", en terme de financement.



Peu d'organismes d'aides osent financer des courts métrages d'horreur ou fantastiques. Est-ce que ça changera un jour ? Je ne sais pas, quand on sait que même Georges A; Romero a du mal à se faire financer ses films, ça fait réfléchir.


Le blog de Cabine of the dead : http://cabineofthedead.unblog.fr/

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